5 trucs pour aider son enfant à passer de 5 à 15 en mathématiques
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mardi 9 mai 2017


Matheux ou littéraire ?


 
Depuis des décennies, dans l’ensemble des familles, quelque-soit le niveau social ou culturel, nous entendons parler de l’opposition entre les matheux et les littéraires. S’en suis l’étiquetage des nouvelles générations, soit dans un camp, soit dans l’autre. Et cette catégorisation arrive parfois dès le plus jeune âge. J’ai rencontré, lors de mes formations, une maman qui avait décrété alors que sa fille était encore en maternelle, qu’elle n’était pas une matheuse, sous prétexte que son grand-frère au même âge allait beaucoup plus vite pour mettre le carré, le triangle ou l’étoile dans le cube d’éveil. Voilà, la messe était dites avant même que l’apprentissage de la matière ne débute.
Mais, hélas ce n’est pas le seul cas. Une autre fois, c’est un papa, ingénieur en hydraulique, lui-même fils d’un ingénieur en mécanique, qui avait remarqué, de façon très pertinente, que son fils était forcément un matheux puisqu’il aimait venir avec son père faire des sudoku. Il ne c’était même pas posé la question, si le plaisir de son fils n’était pas plutôt d’être avec son papa. Si ce dernier avait fait des mots croisés, peut-être que le petit dernier aurait eu droit au sobriquet de littéraire.
Bien sûr ces deux cas sont extrêmes, mais il n’en reste pas moins qu’une grande majorité des parents pensent, sincèrement, que leurs enfants sont, plus ou moins, des littéraires ou des matheux. Et cela peut avoir des conséquences à très long termes.

D’autant que l’on ne s’arrête pas là, on pousse le raisonnement jusqu’à mettre en place des corollaires délirants bon en math, forcement il aime la géographie et la technologie. Bonne en français, elle aimera l’anglais et l’histoire. Mieux, on entend des personnes choisir leur filière, non pas par goût, mais par dégout. J’ai choisi un bac scientifique parce que je suis vraiment trop nul en rédaction. J’ai privilégié une voie littéraire comme je n’y entends rien aux chiffres.

Pourtant, la simple observation aurait dû tordre le cou à cette idée reçue depuis bien longtemps. En effet, il suffit d’observer une classe pour s’apercevoir que certains élèves sont bons dans les deux secteurs. D’ailleurs les spécialistes démontrent qu’il faut avoir un certain degré dans l’apprentissage d’une langue pour pouvoir développer les abstractions mathématiques. Donc, on devrait en déduire que l’un renforce l’autre et non s’oppose. En fait, d’illustres personnages se sont distingués dans les deux domaines. Tout le monde connait le charme de « L’écume des jours » de Boris Vian. Cet homme écrivain, musicien, scénariste avait tous les atouts d’un littéraire bon teint. Pourtant, il était diplômé de la prestigieuse « Ecole Centrale de Paris », un ingénieur poète, certainement une exception. Pas si certain que cela, prenons Henri Poincaré, Mathématicien, physicien et philosophe, bon là vous me direz qu’il porte déjà ce paradoxe dans son nom. Une personne qui s’appelle point carré peut réconcilier les matheux et les littéraires. Trêve de plaisanterie qu’en est-il de Copernic, Descartes ou plus près de nous Etienne Klein ? Et malgré tout ça, cette idée reste fondamentalement ancrée dans l’inconscient collectif.

 Alors, pourquoi croyons-nous si fort à l’existence de cette fameuse bosse des maths ? Reprenons l’origine de ce concept ou du moins de cette supercherie. En 1810, arrive en France le premier traité de « Phrénologie ». Cette théorie part du principe que le crane reflète la personnalité et les capacités d’un individu. Très en vogue au début du XIXème siècle, cette pseudo science énonce que l’on peut déduire le caractère d’un individu en fonction de sa boite crânienne. Untel serait prédisposé à la mélancolie. Un autre, d’après la forme de sa tête, serait un sérial killer en devenir. Du coup, Franz Joseph Gall, fondateur de cette méthode, établit avec son équipe une véritable cartographie, de la caboche, permettant grâce à l’observation et à la palpation de déterminer l’ensemble des traits de caractère d’un individu. Après des études plus poussées et surtout plus rigoureuses, on va s’apercevoir que tout cela ne reposait sur aucun fondement scientifique sérieux. Après quelques années de gloire ou du moins de crédibilité, la « Phrénologie » a repris le chemin des limbes qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Mais elle nous a laissé un petit cadeau ou du moins un gros fardeau  cette fameuse notion de bosse des math. Pourtant, aujourd’hui, grâce à la science, le mystère a disparu. L’imagerie médicale a bien démontrée, qu’il n’y avait pas de cerveau façonné pour les mathématiques et d’autres pour le français. Bien des recherches ont été menées sur ce sujet et la communauté scientifique est formelle. Il n’existe pas de prédisposition pour telle ou telle matière. Voilà, nous venons d’enterrer définitivement cette fameuse protubérance arithmétique.

Pour autant, j’entends des esprits chagrins qui continus à soutenir qu’il y a des personnes plus attachées au monde scientifique et d’autre dont l’appétence conduit vers les humanités. Il ne faut pas être très observateur pour constater que certains enfants préfèrent le domaine scientifique et d’autres restent obstinément fermés aux subtilités de l’algèbre. D’ailleurs, tout le système scolaire français est basé sur ce principe. Il existe des filières scientifiques qui privilégient les mathématiques, la physique, les sciences en général. Et des cursus littéraires ou l’accent est mis sur la littérature, la philosophie ou les langues. Si depuis des années (car cela n’a pas toujours été le cas), les grands dirigeants du savoir ont battis ce genre de cursus c’est inévitablement parce qu’il correspondait à une réalité objective. Cet état de fait prouve bien quelque chose.

Oui, certainement, mais pas forcement, ce que l’on croit.

La vérité est probablement ailleurs. Pour ma part, je suis convaincu que la raison, pour laquelle nous retrouvons dans notre société des personnes plus ou moins attirées par tel ou tel domaine, est liée à un autre phénomène.

 J’aimerais vous parler d’une expérience qui a eu lieu, il y a près de cinquante ans, aux Etats-Unis. Robert Rosenthal, psychologue américain reconnu, décide de faire une petite expérience avec ses étudiants.
Il prend deux groupes de rats, choisi complètement au hasard. Puis, il attribue, de façon arbitraire, au premier groupe de rongeur une intelligence au-dessus de la moyenne. L’autre échantillon étant présenté comme un ramassis de rats aux capacités réduites. Une fois ce postulat déterminé, il forme deux groupes d’étudiants (censé avoir pour leur part des compétences à peu près similaires). Et, leur demande de réaliser une série de tests, de labyrinthes, afin de déterminer l’adresse, voir l’intelligence des muridés. Comme par hasard, les mammifères susceptibles d’être les plus doués, on eût les résultats les plus brillants. Les autres, par contre, ont été minables, certains n’ayant même pas quitté la ligne de départ. En regardant de plus près, on s’est aperçu que les étudiants chargés des champions, avaient encouragé leurs poulains. Galvanisé par ce traitement les rats ont passé, haut la main, les tests. Là où, leurs congénères du groupe B ont échoué lamentablement. Grâce à cette expérience Rosenthal a pu mettre en évidence, que les résultats étaient moins le fait de l’intelligence intrinsèque du rat que de l’image et donc du comportement de l’étudiant testeur. Les manageurs, convaincus des capacités de leurs protégés, ont eu un comportement stimulant qui a permis d’exacerber leurs réelles qualités.

 Fort de cette expérience, le professeur décide de passer à une autre échelle, cette fois-ci dans une école primaire de la banlieue de San Francisco. Pour minimiser les influences extérieures sur l’expérience, l’établissement est sélectionné dans un quartier pauvre, à forte population défavorisée. Les parents travaillent parfois tard le soir, ne maîtrisent pas très bien la langue. Nous nous retrouvons donc avec des enfants dont la stimulation émane essentiellement de l’enseignement. L’influence du milieu familial et culturel interfère, de ce fait, un minimum sur l’étude.
Le psychologue se présente aux enseignants, comme un chercheur, de la prestigieuse université de Harvard (ce qui crédibilise la démarche), qui réalise une étude sur l’intelligence. Le but de l’expérience est de faire passer un test de quotient intellectuel aux élèves afin de déterminer le rapport entre l’âge et le niveau d’intelligence. Nous sommes en 1966, à cette époque l’idée dominante est que l’intelligence est liée à l’innée et reste une donnée immuable.
Une fois la batterie de test effectuée, Rosenthal attribue de façon aléatoire à vingt pourcent des élèves une note surévaluée. Puis, grâce à un stratagème, il fait parvenir ses résultats aux enseignants, qui n’étaient pas censés les connaitre. Une année se passe, le professeur revient dans l’établissement et refait passer des tests psychotechniques aux enfants. Le résultat est sans appel, les élèves dont le QI avait été surévalué ont progressé parfois de façon spectaculaire. On comprend aisément la mécanique qui s’est mise en place. Les enseignants se sont comportés comme les étudiants, valorisant, stimulant les enfants, dont ils étaient persuadés des capacités intellectuelles. En fait, ces élèves ne pouvaient pas échouer. Ils étaient plus intelligents que la moyenne. S’ils n’avaient pas réussi, c’eût été un non-sens, une anomalie dans le grand équilibre de l’univers, voire pire, certainement, un indicateur d’incompétence de l’enseignant. Donc les professeurs ont tout mis en œuvre pour que les petits génies aient de bonnes notes.  En conséquence, les enfants ont progressé, rendant conforme les croyances et les résultats. C’est que Rosenthal a appelé « l’effet Pygmalion ».

Mais plus généralement, nous pouvons le définir comme  une « prévision auto-réalisatrice ». La base de ce concept est la suivante : si l’on pense qu’une chose va advenir, on met en place des stratégies inconscientes, qui finissent par conduire à la réalité de notre croyance d’origine. En un mot, nous mettons en cohérence nos convictions et la réalité. 
On retrouve ce mécanisme dans beaucoup de secteurs. En finance, par exemple, une rumeur cours sur la baisse d’une action ou d’une monnaie, conséquence, les détenteurs de, la dites, part sociale ou de la devise vendent de peur de voir leur investissement perdre de sa valeur. Ce comportement entraine la baisse et effectivement quelques jours plus tard, les investisseurs constatent un cours en dessous de leur niveau de vente. Ils ont eu raison de céder leurs titres, mais ils ont aussi provoqué cette situation.
Dans le domaine médical c’est encore plus étonnant, l’effet placebo est purement une prophétie auto-réalisatrice. Je prends un cachet sans aucun produit actif, mais persuadé qu’il va me faire du bien, je vais mieux. Convaincu, par les bienfaits de la pilule, elle me soigne, alors qu’il n’y a aucune raison objective de ce mieux être.
Dans le milieu scolaire, c’est la même chose. L’attrait ou le désintérêt des enfants, pour un domaine, relève du même mécanisme.
Reprenons mon papa du début. Cet homme est persuadé que son fils est doué pour les mathématiques. Penchons-nous, sur son comportement au quotidien. Lorsque son enfant rencontrera quelques difficultés dans cette matière, il trouvera la situation anormale et recherchera toutes les possibilités d’améliorer les choses. Il surveillera, de plus près, ses devoirs, travaillera avec lui les cours et les exercices. Si besoin, il fera même prendre des cours. C’est impossible que son fils matheux ne soit pas excellent dans cette matière. D’ailleurs, grâce à tout cela, l’enfant aura de bons résultats. Le père a toujours dit que son fils était un matheux et, effectivement, c’est ce qu’il est devenu. Imaginons, qu’en plus ce papa soit persuadé que lorsque l’on est bon en matière scientifique on est forcément nul en français. Lorsque son enfant aura de mauvais résultats dans cette matière, il trouvera ça tout à fait normal. Ne s’en offusquera pas. Ne cherchera pas de solution, on ne peut rien faire contre la nature. J’ai même vu certains parents dire de leur enfant. « Il est nul en géographie, comme moi à son âge ». Il ne faut pas s’étonner du résultat produit.
Et ces croyances arrivent très jeune dans la vie de nos enfants. Dès la maternelle, malgré nous, nous catégorisons nos chers petits et l’étiquette va rester collée jusqu’à la fin du lycée. On est dans la prophétie auto-réalisatrice la plus longue de toute l’histoire de l’humanité. Pourtant, il suffirait que l’on s’enlève du crane cette croyance qui oppose les matières dites littéraires à celles dites scientifiques. Nos enfants peuvent être bons dans tous les domaines. En changeant notre vision des choses, nous pouvons changer le court des choses. Alors, je vous propose un autre logiciel. Mon enfant peut-être bon dans toutes les matières, aimer la philosophie et la physique. Cela n’a rien d’antinomique.

1 commentaire:

  1. Il est vrai que parfois on "catégorise" un peu vite nos enfants.
    Merci pour cette article.
    Natahlie

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